Le Burkina Faso, Patrie des Hommes Intègres dispose de six (06) frontières. La frontière, elle n’est plus à démontrer, revêt des dimensions politiques, juridiques, stratégiques et historiques.

S’il est vrai qu’une coopération gagnant-gagnant avec les pays frontaliers dans divers domaines est à encourager et à soutenir, le contexte et l’actualité commandent de prospecter de nouvelles formes de coopération et d’approche.

De mon humble avis et c’est peut-être connu de tous, le niveau de développement de nombre de zones situées sur la ligne frontière peut être interprété comme le reflet de l’échec des politiques publiques ou la faiblesse d’une volonté de construire une Nation forte. De Botou à Kpueré, de Morolaba à Tin-Akoff en passant par Kombori, Kain, Diguel et j’en passe, le panorama est jonché de tristes constats. Si ce ne sont pas les communautés frontalières qui se sentent oubliées dans les politiques publiques de développement, ce sont les dépositaires de l’autorité de l’Etat (Préfet, Haut-commissaire) qui se sentent en déphasage avec le luxe de la hiérarchie. Cette image saisissante de l’Etat n’est guère reluisante.

Il n’en est pas moins vrai de constater que ces zones sont reléguées au dernier wagon des priorités. Conséquences, elles deviennent le terreau de la criminalité, du grand banditisme et de la délinquance.

L’ampleur de cette situation semble alerter déjà les Hautes Autorités car le Conseil de ministres de la Transition en sa séance du 14 octobre 2015 adoptait la Stratégie Nationale de Gestion des Frontières (SNGF) 2016-2025 et le Programme d’Appui à la Gestion Intégrée des Frontières (PAGIF). Aussi en sa séance du 16 décembre 2016, le Conseil de ministres a adopté un Rapport relatif à la coopération transfrontalière au Burkina Faso. ‘‘Le Conseil a instruit les ministres en charge du dossier de prendre les dispositions nécessaires au renforcement des acquis dans la construction des espaces frontaliers intégrés », tels sont les mots égrenés dans ledit rapport.

S’il faut saluer à juste titre la volonté politique affichée par les Autorités et l’engagement des Partenaires Techniques et Financiers (PTF) à investir dans les zones frontalières, il faut surtout les inviter à plus d’actes concrets et durables au profit des communautés.

Un Etat à six (06) frontières ne saurait réussir le développement de ses zones frontalières sans une mutualisation des efforts avec les pays voisins. C’est en cela que la coopération transfrontalière revêt tout son sens et demande à être dynamisée. Mille raisons militent en faveur de cette approche et nul ne peut en douter. Les communautés de part et d’autre de la frontière partagent les mêmes langues, les mêmes cultures, les mêmes modes de vie… Jadis la même famille, aujourd’hui ces communautés se retrouvent  » fragmentées » dans le même espace par une ligne artificielle. Cette ligne, qu’elle s’appelle frontière ou barrière est souvent en contradiction avec leur l’histoire et même la géographie.

La nécessité est impérieuse pour l’Etat, compte tenu du panorama peu enviable qu’offrent ces zones, de booster la coopération transfrontalière par l’appui à la construction d’une intercommunalité transfrontalière entre les collectivités territoriales, de créer les conditions pour l’instauration d’une synergie entre autorités frontalières et sociétés civiles de part et d’autre de la ligne frontière. Cela contribuera à trouver des solutions communes aux défis communs des Etats. La culture d’une gouvernance locale transfrontalière est à instaurer et à soutenir. C’est par une approche multiniveau et multi-acteur que ces zones pourront connaitre un développement harmonieux au bénéfice des communautés.

Etant donné que ce qui va sans dire va mieux en se disant, les Institutions communautaires ne valent que si elles fédèrent les communautés et réalisent leurs aspirations. Au-delà des efforts que chaque Etat doit consentir pour le développement de ses zones frontalières, il n’est point superflu de relever que la construction d’une CEDEAO des peuples, tant clamée et réclamée passe par l’adoption de mesures favorables à une coopération entre les entités territoriales nationales. Une obligation pèse sur cette Institution qui doit travailler à faire des frontières de ses Etats membres, des passerelles et non des barrières entre les communautés. L’amorce étant déjà lancée avec la libre circulation des personnes et des biens, il faut accélérer le processus.

Aussi, l’édification d’une UEMOA des communautés passe par le rétablissement des affinités, des proximités là où des volontés politiques nationales et étrangères ont créé des distances, des différences entre des communautés sœurs. L’Institution se doit d’agir à cet effet.

Il faut à l’Afrique des politiques qui décloisonnent les entités territoriales, qui fédèrent les communautés.

Il y a plus à gagner dans la Fraternité des Peuples que dans la solidarité des Hommes politiques.



BEDA Maurice

Citoyen burkinabè

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Source: LeFaso.net