Après sa suspension hier 20 décembre : Procès du projet d’attaque de la MACA : Aussitôt commencé, aussitôt suspendu
le procès des militaires qui projetaient attaquer la Maison d’arrêt et de correction des armées a repris ce 21 décembre. Les avocats sont restés sur leur position en demandant le renvoi du procès en vue de mieux préparer la défense de leurs clients. La tension est montée entre temps entre les avocats qui plaidaient pour le renvoi et le commissaire du gouvernement qui invitait ‘’ à aller au débat ». Après des tractations, sous haute tension, le président a finalement donné rendez-vous pour le 5 janvier 2017.
L’atmosphère était tendue ce 21 décembre 2016 dans la salle d’audience du tribunal militaire. Ce, après les passes d’armes entre le commissaire du gouvernement et les avocats commis d’office. Ces derniers demandaient le report du procès parce que selon eux, toutes les conditions n’étaient pas réunies pour un procès équitable. Leurs vis-à-vis ne l’entendaient pas de cette oreille. Le président du tribunal Seydou Ouédraogo, avait fini par leur donner rendez-vous ce 21 décembre à midi, le temps que les avocats prennent connaissances du dossier.
La chronologie des faits.
12h15 : Le président du tribunal fait son entrée dans la salle d’audience. Après s’être installé, il déclare espérer que les avocats ont eu maintenant le temps de s’entretenir avec leurs clients et s’imprégner de certaines pièces du dossier.
12h18 : Me Armand Sampébré prend la parole. Il fait savoir au président qu’il était difficile pour la trentaine d’avocats de consulter le dossier, dont une seule copie était à leur disposition. Ils se sont organisés à tour de rôle pour consulter le volumineux document. « Nous estimons que nous ne sommes pas à mesure de défendre convenablement nos clients. Nous réitérons le renvoi du procès », dit-il, pour deux semaines, comme demandé la veille.
12h 22 : Le commissaire du gouvernement intervient. Il indique que la question a été débattue la veille et que le parquet ne se reproche absolument rien. A l’attention du président du tribunal, le commissaire du gouvernement lance, « ils (Nldr. Les avocats) ont suffisamment le temps. Nous avons mis une salle à leur disposition, nous sommes étonnés qu’on vienne nous dire que le temps n’a pas suffi ». Il ajoute ne pas vouloir de choc avec qui que ce soit, mais appelle à aller au débat. « Mais on ne peut pas forcer quelqu’un à aller au débat », tranche-t-il.
Le ton monte. 12h23 : Le ministère public intervient et demande à chaque partie d’assumer ses responsabilités dans le cadre de cette procédure. « Il ne faut pas perdre de vue les attentes de la population. Il finit par déclarer la requête des avocats ‘’excessive ».
12h28 : Me Arnaud Ouédraogo, fait monter la tension. Il s’adresse directement au commissaire du gouvernement qui, selon lui pense ‘’qu’on » le met en cause. « Personne ne vous défie, nous sommes devant un fait qui est constatable ». Il se demande d’ailleurs « pourquoi ce fétichisme de date pour le jugement de ce dossier » et ajoute qu’en tant qu’avocat et conseil, c’est la défense de leur client et la manifestation de la vérité qui les intéresse.
Il fait savoir au commissaire du gouvernement que eux avocats, ne sont ni sous son autorité, ni à son école. Le procès selon lui, ne doit pas être perçu comme un cadeau de Noel que l’on donne à la population. « S’il vous plait, libérons-vous de l’agenda politique, nous refusons de nous laisser enchainer dans un tel agenda », clame-t-il.
12h33 : Me Christophe Birba enfonce le clou et fait des observations. D’abord il invite à quitter le populisme qui entraine d’ailleurs la plupart des erreurs judiciaires. « S’il vous plait, quittons dans ça », lance –t- il.
Ensuite, il rassure le président que les avocats n’ont pas l’intention de soustraire qui que ce soit à la justice. Mais leur démarche qui consiste à demander le renvoi du dossier, est guidée par le souci d’une justice équitable. Il indique que « la communication du dossier doit être complète, intégrale et loyale ». Il n’est pas question pour lui, de communiquer certaines pièces du dossier en gardant d’autres.
Entre temps, deux autres avocats interviennent, Michel Traoré et Me Zagré. Comme leurs confrères, ils plaident pour le report du jugement. Il faut éviter une justice expéditive. « Cette demande de renvoi ne coute rien », disent-ils.
12h40 : Le commissaire du gouvernement rempile, cette fois avec autorité. Il répond à Me Arnaud Ouédraogo. Alioune Zanré dit ne pas vouloir rentrer dans des polémiques de tiraillement stériles. Il ne semble pas digérer que l’avocat parle d’agenda politique caché derrière ce procès. « Ne prêtez pas d’intentions à autrui. Ce n’est pas bien, ce n’est pas bon. Le parquet ne choisit pas de date de procès (…) Autant dans vos cabinets vous êtes libres de faire ce que vous voulez, autant au parquet nous sommes libres de faire ce que nous voulons ».
C’est sur cette montée de tension que le président suspend la séance à 12h43. Quand il revient à 13h25, Seydou Ouédraogo rejette la demande des avocats. Ces derniers font savoir que dans ces conditions, ils ne pourront pas exercer convenablement leur ministère. Ils vident alors la salle d’audience et laissent seulement les deux conseils choisis.
« C’est en désespoir de cause que nous avons été obligés de façon collective, en ce qui concerne les avocats commis d’office, de nous déporter dans ce dossier. Depuis hier, nous avons insisté pour que le tribunal sache que nous avons reçu les dossiers de façon parcellaire et cela ne nous a pas permis d’organiser la défense de nos clients. Hélas, le tribunal est passé outre nos demandes insistantes ». C’est pendant que Me Arnaud nous disait ces mots hors de la salle d’audience que nous entendions par les haut-parleurs, le président du tribunal, Seydou Ouédraogo renvoyer le dossier au 5 janvier.
« On avisera, le plus important pour nous était d’avoir du temps pour bien défendre. Nous sommes en matière criminelle, ce sont des gens qui encourent la peine de mort. C’est une lourde responsabilité pour des avocats de s’engager en faisant de la figuration dans un procès », nous confiera Me Arnaud Ouédraogo qui a retrouvé le sourire entre temps.
Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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