Le journal bimensuel « L’EVENEMENT » dans sa parution n°325 du 10 mai 2016 a publié à ses pages 7 à 9 une interview que vous avez bien voulu lui accorder.
C’est avec un effet de surprise et une grande consternation que le Syndicat National des Travailleurs des Douanes a pris connaissance de vos déclarations. Celles-ci traduisent une ignorance inimaginable de la gestion des hommes à tel point que le SYNATRAD doute de votre professionnalisme, de vos capacités réelles à assurer le rôle de chef d’orchestre de ce grand département ministériel, contrairement à vos dires d’avoir les acquis nécessaires pour assumer la fonction.
Madame le Ministre, vous prononçant sur l’affaire du Fonds commun accordé aux agents de votre ministère vous affirmez que « … nous sommes arrivés à une situation où ce fonds n’est pas durable. La durabilité est en cause pourquoi ? Ce qu’ils arrivent à réaliser comme recettes en matière de saisies frauduleuses n’arrive plus à couvrir ce qu’ils avaient reçu par le passé.
Par exemple, quelqu’un qui recouvre deux milliards alors que par le passé il a touché quelque chose de onze milliards. Cela veut dire que les neuf milliards restant, on doit aller les prendre dans la Caisse pour compléter. Je vous pose la question est-ce que c’est juste ? Autant c’est juste qu’il faille encourager les agents pour traquer les fraudeurs, autant c’est encore plus juste d’utiliser les fonds qu’on aurait récupérés de cela et pas d’autres fonds pris chez des contribuables honnêtes. Malheureusement, cela a été perçu comme des acquis du passé et chaque année, il faut leur servir cette somme. »
Madame le Ministre, le SYNATRAD qui a déposé une demande d’audience depuis le 29 février 2016 à votre cabinet (demande restée sans suite) observe que vous avez fait le choix de mépriser les travailleurs du ministère en allant exposer des problèmes qui les concernent et qui vous empêchent de dormir à la place publique au lieu de les réunir pour dire ce qui semble être « vos vérités ». Il constate que vous accusez ses militants et les autres bénéficiaires du Fonds commun de perpétrer un détournement de fonds publics, d’être injustes vis-à-vis des autres Burkinabè et il prend acte de votre intention d’arrêter son octroi.
Madame le Ministre, le SYNATRAD vous conseille de vous approcher de personnes avisées ou de vous documenter afin de prendre connaissance que depuis 1963, le Fonds commun est institué au sein de l’administration des douanes par l’Arrêté n°68/F-D du 09 février. La situation actuelle dans laquelle sa base est assise n’est qu’une évolution normale de son histoire. Cette histoire vous échappe véritablement dans la mesure où c’est aujourd’hui que vous découvrez son existence.
Oui, pour le SYNATRAD, la base actuelle du Fonds commun constitue effectivement un acquis du passé, obtenu de haute lutte. A son sens, vous devriez comprendre que cet acquis n’est plus une simple perception mais un fait accompli, une réalité. En outre, vous affichez clairement l’intention de remettre en cause le principe de l’octroi à vos agents de cette ristourne sur les recouvrements. Comme vous ne le savez pas, le SYNATRAD vous informe que cette pratique n’est pas une bévue des différents gouvernements qui se sont succédé dans notre pays, encore moins une invention des agents du ministère.
Ailleurs, au Niger, en Côte d’Ivoire et au Sénégal, pour ne citer que ces pays-là en exemple, c’est même mieux que ça et vous avez les moyens de le vérifier. Quant à votre réaction sur la justesse du prélèvementde ce Fonds, le SYNATRAD s’insurge vigoureusement contre votre propos qui vise à stigmatiser les travailleurs du ministère et à susciter des contestations de cet élément de stimulation par d’autres corporations.
En tous les cas, il ose croire que madame le joker de Roch comme vous a appelé le journal, s’obligera dans les meilleurs délais, à donner des explications sur sa sortie médiatique au personnel qui a été beaucoup éprouvé et, à s’excuser. Contrairement à vos dires, vous n’avez pas fait preuve de responsabilité et vous n’avez pas rassuré les collaborateurs que vous avez réellement les capacités nécessaires pour les manager.
Madame le Ministre, dans la même interview, vous confirmez à la rédaction du journal « … avoir dit à des collaborateurs que leurs postes sont vacants et que 40% des prochaines nominations seront consacrées aux femmes ». Vous ajoutez que « lorsque vous êtes arrivées à la tête du ministère, vous avez demandé à ceux qui veulent travailler, déclarez-vous ! ».
Le SYNATRAD dénonce ce manque de respect que vous affichez envers vos collaborateurs et le bafouillage de leur dignité. Il est pathétique d’entendre ce genre de propos. Que voulez-vous encore attendre de quelqu’un dont on lui a annoncé son limogeage de fait et qui ne représente plus rien aux yeux de son supérieur hiérarchique ?
S’agissant de votre propension à faire suffisamment de places aux femmes au sein du ministère, le SYNATRAD s’interroge perpétuellement à savoir si votre nomination à la tête du département est due au fait que le chef du gouvernement a voulu faire seulement une promotion du genre féminin ou c’est au regard de vos compétences professionnelles ?
Pour sa part, le SYNATRAD n’a pas connaissance de l’existence d’une violation des règles constitutionnelles qui consacrent l’égalité des sexes à occuper les emplois et à exercer les fonctions. Aussi, notre organisation serait bien réceptive des cas d’injustice que vous voudriez bien lui montrer. Elle restera vigilante face à d’éventuelles dérives qui pourraient survenir de votre détermination exagérée à responsabiliser les femmes sous l’angle d’une vengeance inouïe.
Madame le Ministre, parlant de l’occupation des cadres du ministère, vous affirmez que : « c’est sur la base du CV je rencontre les gens. J’ai rencontré des personnes que j’ai interviewées, le CV était bon mais ils ne m’ont pas fait bonne impression. Je leur ai dit que je voulais faire juste connaissance ».
Le SYNATRAD trouve ce propos dénué d’humilité. C’est une triste façon de diminuer des gens qui ont conduit les affaires du ministère, qui se sont insurgés et qui ne sont pas aussi impressionnés par ceux qui travaillent dans les organisations internationales. Si le poste de ministre en charge des finances était ouvert à candidature, madame le joker de Roch, il se pourrait que des hommes et des femmes restés ici au pays pour mener leur carrière vous contraignent à terminer à l’étranger en s’imposant devant vous contre votre attente. Ils sont nombreux, les militants du SYNATRAD et les militants des autres organisations syndicales du ministère, qui méritent votre respect à travers leur CV et à travers leurs compétences professionnelles.
Concernant la justification de la nomination de votre nouvelle DIRCAB (Directrice de cabinet, ndlr), vous auriez dû dire simplement qu’elle vous a été recommandée. En effet, vous dites : « celle que j’ai nommée DIRCAB, je ne la connaissais ni d’Adam, ni d’Eve. … On m’a dit qu’il y a une dame qui était DIRCAB à la Présidence sous la Transition, si je ne me trompe. J’ai dit de chercher son CV. C’est comme ça que je l’ai identifiée et nommée. ». Madame le joker de Roch, vous avez eu à consulter le CV de quelle autre personne ?
De plus, vous informez l’opinion que vous vous êtes séparée de votre ex-DIRCAB parce qu’il était simplement du Trésor. Mettez-vous un seul instant à la place de ce cadre, chef de famille, qui a exercé cette fonction depuis un certain temps. Il devrait avoir une autre manière de saluer son dévouement et sa loyauté, de le remercier que de faire cette déclaration affreuse.
Madame le Ministre, à travers ces observations, le SYNATRAD :
condamne votre attitude qui manque de grandeur et d’humilité ;
vous tient pour responsable de la dégradation éventuelle du climat social qui se profile à l’horizon ;
s’inquiète de l’état de découragement qui a atteint ses militants du fait de vos propos ;
exige une clarification de tous ces propos ;
veut des excuses publiques à l’endroit de ses militants ;
réclame vite une rencontre pour vous dire ses vérités ;
appelle ses militants à rester vigilants et à se tenir mobilisés pour toute éventualité ;
demande au chef du gouvernement de prendre les mesures appropriées face à cette situation.
Ouagadougou, le 26 mai 2016
Le Secrétaire général
Mathias KADIOGO
Inspecteur des douanes
Source: LeFaso.net
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